Mauvaise Ruelle Feat. Basileus Shin

Tu t’étais levé de bonne patte ce matin. En effet, ta journée allait être remplie, et tu n’avais pas de temps à perdre, n’est-ce pas, Basileus ?

Comme tous les matins tu t’étais levé à heure fixe, avant l’aurore, tu avais ravivé le feu des cheminées de la maison, puis tu étais aller saluer ta mère. Comme toujours, tu t’inquiétais pour elle, car si la féline ne dormait que très peu la nuit, elle ne dormait pas non plus beaucoup en journée. Mais pourtant, elle était toujours là, assise sur son tabouret rembourré, penchée sur son bureau, entourée de papier, d’encre, de verrerie, et parfois, accompagnée d’un serpent. Et comme toujours, Lady Cassandra travaillais avec acharnement.

Ton objectif de la journée, cependant, ce n’était pas de suivre son travail, tu en savais déjà bien assez dessus, non… tu avais autre chose à faire.

Après un déjeuné assez modeste autour d’une tasse de lait chaude aux herbes aromatiques, de quelques baies et d’un soupçon de viande, tu avais quitté la maison pour aller vaquer à tes affaires avec d’autres aristocrates ce matin. Une matinée haute en couleur, encore une fois, à te comporter comme ce jeune mage énergétique énervant que tu n’étais pas…

Oui, une matinée bien ennuyeuse à te coltiner le gratin de la cité. Tu n’étais surement pas le plus agréable d’entre eux, mais tes discussions avec eux t’ennuyais. A part parler de chose que tu savais souvent déjà, pour tenter de briller en apportant son brin de culture générale, et à cacher ses injures dans un panache de parfum, de velours, de subtilité, qui démontrait davantage le génie parfois gâché de ces jeunes aristocrates qui passent plus de temps à essayer d’avoir de l’esprit que d’essayer de développer les sujets intéressants qui méritent d’être creusés. Et toi, dans tout ça, tu ne faisais pas mieux. Derrière ton masque superficiel, tu analysais les visages, les phrases, tu cherchais les émotions, la vérité, tu t’exerçais encore et toujours à démêler le vrai du faux. Il est vrai que parfois, des personnes plus intéressantes faisaient leur apparition. Mais tu les évitais. Pourquoi ? Les personnes que tu trouvais les plus intéressantes, c’était les plus intelligentes. Et mieux que de sous-estimer ton adversaire, tu préfères te méfier des plus malins, qui, si ils te perçaient à jour, pourraient te causer des problèmes.

Patience, Basileus… tu te disais ça tout le temps, mais pourtant tu avais l’irrésistible envie d’aller te confronter à des personnes plus dangereuses, plus intéressantes, tu étais en plus sûr que tu pourrais les berner, les rouler dans la farine, et ce, non une certaine aisance. Tu étais surement assez bon pour réussir, mais comme d’habitude, tu craignais de te croire trop bon. Oui, tu allais accomplir la vengeance de ta mère, ta vengeance. Tu allais le faire, mais il ne fallait pas griller les étapes. Bien que tu sois déjà un assassin fatal, tu ne pourrais pas faire grand-chose si la garde royale décidait de te rechercher.

Et surtout, si tu étais soupçonné… ta mère serait en danger.

Alors que tu songeais à tout cela, tu déambulais un peu dans les rues, tu étais sur le chemin du meilleur pâtissier de la ville -enfin, selon toi, pour de nombreuses personnes, sa petite échoppe n’en valait même pas le détour…-, puisse que passer une demie journée avec le gratin des idiots, ça creusait ta panse. Enfin bon. Puis du coin de l’œil, tu vis, une cape bleue. Une petite masse sous une cape bleue nuit. Tu tournes la tête. L’endroit vers laquelle cette petite cape bleue se dirigeait n’était pas anodin. Et pour que cette petite cape bleue aille par-là, il n’y avait pas dix milles solutions qui traversaient ta tête. Quelque chose de si petit et fragile qui irait vers des rues aussi peu recommandable… surtout que tu les connaissais, ces rues… tu étais un assassin tout de même… donc…

Tu fis un détour, te dirigeant vers des rues moins peuplées, des rues moins agitées, puis tu pénétras dans ces lieux sombres en toute discrétion. Tu calculais les possibilités dans ta tête, et tu faisais le tour des ruelles où il était le plus probable que la petite cape soit allée. Tu ne la trouvas pas tout de suite, mais tu entendis un grognement dans une ruelle voisine. Et dans cette ruelle voisine, il y avait la cape bleue.

Et comme tu t’en doutais, ça avait vraiment l’air d’un chaton perdu. Mais tu jetas un œil vers la source du grognement.

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Ton expertise était toujours aussi fine : c’était bien un chaton perdu. Un chaton perdu qui n’avait rien trouver de mieux que d’aller se perdre dans ces ruelles-ci, précisément. Mais quelque chose ne tarda pas à attirer ton attention, très cher Basileus, en effet, c’était cette « chose » qui grognait… car oui hélas, ce loup était dans un état si pitoyable que de loin, et surement même de près, ça ressemblait à une chose… légèrement informe… grisâtre… épaisse et hirsute… Tu n’avais aucune idée de ses intentions envers ce chaton mais tu te doutais qu’elles étaient peu recommandables…

Tu entendis le chaton plaider qu’elle était perdue, ô surprise, et qu’elle n’avait pas de tokken sur elle, mais ce n’était pas pour autant que le loup continuait de s’approcher avec cet air qui trahissait une merveilleuse intention de communication construite et enrichissante…

… Ouaip c’était mal barré pour la petite.

Mais ce n’était pas pour autant que tu allais agir… ou tout du moins, tu n’allais pas agir tout de suite, parce que : tu étais patient et analytique, et aussi, tu avais le luxe d’être suffisamment rapide pour pouvoir intervenir au tout dernier moment… surtout contre un loup qui semblait avoir passer l’âge de chasser le lapin dans les champs. Et ainsi, dans ta patience de meurtrier et de calculateur, tu pus observer la petite féline sortir un sceptre de sous sa cape. Bien qu’elle fut un peu pataude avec, elle tenu bon et ne le laissa pas tomber. Il y avait donc possibilité qu’elle se soit entraînée à le manier précédemment… aussi, comme elle avait baissé sa capuche, tu pouvais constater qu’il s’agissait d’un chaton blanc et vert, avec des… fleurs… ?

Cette petite chose que tu avais au départ cru sans défense ne l’était peut-être pas tant finalement. Elle avait été clairement exposée à la magie, et aussi… tu n’étais pas aveugle et tu voyais bien qu’elle avait un sceptre. Elle devait donc… s’entraîner à la magie. A la vue de son jeune âge, et de son manque de calme face à cette situation, il était clair qu’elle doutait être capable de se sortir de cette situation toute seule, mais, elle avait un espoir de pouvoir faire quelque chose, ou elle se serait déjà enfuie. En tout cas, toujours dans l’analyse, tu l’interprétais comme ça.

Il y eut un flottement entre le moment où elle se saisit tant bien que mal de son sceptre et où quelque chose se passa finalement. Et ce qu’il c’était passé c’était un parterre de fleur, des fleurs colorées qui rajoutaient un soupçon de vie inattendu à ce cadre sinistre. Bon tu t’en doutais bien… elle c’était foiré. Maintenant que tu avais vu ce que tu voulais voir, tu te décidais à intervenir parce que bon merci mais en fait, t’avais autre chose à faire et t’avais quand même bien envie d’aller t’acheter une pâtisserie avant que le temps ne t’en manque…

Mieux qu’un parterre de fleur, Basileus trouvait d’avantage son inspiration dans les flammes cet après-midi : un froncement de sourcil et un geste du bout de la patte, tu soulevas un mur de flamme entre la jeune féline et… la chose.

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S
i tu veux sortir d’ici… suis moi. "

Une chose était sûre : tu n’aimais pas tourner autour du pot. Et tu t’apprêtais déjà à filer.

Tu savais que la jeune féline t’avait aperçu, là, dans l’ombre, mais la lumière des flammes l’empêchait visiblement de te distinguer correctement. Figée sur place, elle n’avait pas l’air de savoir quoi faire. Il est vrai que de voir un mur de flamme surgir de sous son nez sans prévenir n’aidait pas vraiment au calme de l’esprit. Mais c’était peut-être plutôt de se rendre compte qu’il y avait bien une troisième personne dans la ruelle qui l’avait figée… oui après tout, elle avait bien chercher du regard où tu te trouvais, avant d’arrêter de bouger. Mais tu savais que cette petite féline n’était pas sans courage. Elle était prête à se défendre jusqu’au bout si il le fallait, tu l’avais vu… et pourtant entre un chaton et un vieux loup, le rapport de force se faisait assez vite… tout restait de savoir qui serait le plus rapide ou le plus agile.

Se coller contre un mur contre un vieil adversaire, d’ailleurs, ce n’était peut-être pas la meilleure solution. Etant jeune, elle aurait pu se servir de sa vitesse pour esquiver un potentiel assaut, et en profiter pour le dépasser et filer. Et avoir un mur collé contre elle n’augmentait pas son champ d’action… après il y avait toujours une possibilité que le loup la rattrape, mais tout cela ne dépendait que des compétences de chacun.

Mais pour l’instant, tu faisais déjà volte-face. Tu avais mieux à faire que de la charité… même si tu t’en voudrais de laisser ce chaton perdu ici. Cependant, tu ne pouvais pas trop te laisser apercevoir, et tu comptais jouer ça finement, cependant il fallait juste espérer que la jeune féline soit suffisamment… réactive. Elle sembler ne pas manquer d’audace cependant, du moins à tes yeux, donc tu ne t’inquiétais pas trop. D’ailleurs tu espérais d’avantage qu’elle ne soit pas… trop réactive.

Donc, tu fais volte-face, et file dans la ruelle suivante, tentant d’écouter les éventuels bruits de patte derrière toi pour adapter le rythme de ta course afin de n’être qu’a peine visible lorsque tu changes de ruelle, ainsi, tu lui laisserais connaissance du chemin à suivre mais elle ne pourrait pas te voir… mais si tu n’entends aucun bruit de patte derrière toi alors… tu n’attends pas. Néanmoins, espérant réussir à avoir le bon rythme, tentant donc de ne pas la perdre et de ne pas te faire voir, tu prends ta course dans les ruelles sombres…

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Alors que tu pris ta course, tu entendis derrière toi le bruit des petites pattes félines qui martelaient le sol, dans une course effrénée pour ne pas se faire distancée. Pendant un instant, tu avais cru qu’elle ne te suivrait pas. Tu savais qu’elle n’avait pas réagit au quart de tour, et en soi, c’était normal et tu t’y étais attendu. Ton apparition, ainsi que ton comportement, avaient dû la surprendre. Peut-être qu’elle ne savait toujours pas si elle pouvait te faire confiance, quoi qu’il en soit, elle avait choisi de tenter sa chance, et de te suivre pour sortir de ses lieux.

Tu l’entendis pousser pour combler la distance qui la séparait de toi, et par conséquent, tu accéléras légèrement : hors de question qu’elle parvienne à voir qui tu étais. Enfin, ce que tu voulais, surtout, c’est qu’elle ne puisse pas te reconnaitre à l’avenir, ou qu’elle puisse te décrire trop précisément : tu n’avais pas envie qu’on sache que tu étais dans ses ruelles, et, surtout, tu n’avais point envie qu’on essaye de savoir ce que tu y faisais… Tu pouvais répondre que tu sauvais un chaton, et ce n’était, par ailleurs, que pure vérité, hélas, il aurait été plus dur de justifier ce pourquoi tu connaissais ces lieux… du moins, que tu ne t’étais pas perdu dedans.

Un remerciement survint de derrière toi, entre deux souffles, qui te semblaient assez pénible pour ton expérience d’assassin. Tu n’étais toi-même pas très endurant, mais tu connaissais ton corps par cœur, un corps léger, profilé pour la vitesse, et tu n’allais certainement pas à ton maximum… surtout que tu n’atteignais ton maximum que par magie du vent, mais inutile de révéler davantage de tes talents à cette jeune inconnue. Aussi, la sortie n’était pas très loin, quand on connaissait l’endroit, vous y seriez en quelques instants.

« Ne me remercie pas, remercie ta chance, mais ne compte pas sur elle pour te sauver la peau à chaque fois ! »

Tu parlais naturellement d’une voix bien plus grave que celle que tu prenais d’habitude : si ta vraie voix était douce et feutrée, tu avais d’avantage l’usage d’une voix plus forte et fluette, et très nasillarde, puisse que ça collait si bien à ton personnage… Ici, tu avais employé une voix que tu avais voulu plus profonde, et pris soin de la faire rouler dans ta gorge pour la rendre un peu plus rocailleuse. Bien sûr, ton timbre de voix restait toujours reconnaissable, tu n’étais pas un génie capable de changer de voix non plus, mais… tu n’avais pas affaire à un espion, alors, c’était amplement suffisant. Tu avais par ailleurs utilisé un ton sévère et sec, tu t’étais même retenu d’ajouter qu’un manque d’endurance pareil était pathétique, et d’autres détails, mais ce n’était pas tes pensées, et tu n’avais pas non plus envie de secouer d’avantage ce chaton. Cependant, tu espérais que ce genre de problème ne lui arriverait plus à l'avenir, ou qu'elle prenne des mesures pour ne plus pouvoir être menacée de la sorte.

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Tu évaluas la situation rapidement et en déduis que tu allais pouvoir enfin disparaitre. Oui, disparaitre, du moins, hors de la vue de cette enfant. C’était bien ton objectif premier. Tu n’étais pas censé être là, n’est-ce pas ? Alors il fallait que tu disparaisses, comme si tu n’avais jamais été là.
La jeune féline s’excusa et demanda rapidement si c’était encore loin. Tu l’avais déjà senti, elle fatiguait, elle avait même ralenti. Avec un peu de chance ça l’aiderai à retenir la leçon. Tu élevas alors la voix, en conservant ce ton grave que tu avais employé précédemment.

« Si tu continues tout droit et que tu tournes à droite dans deux ruelles, tu retrouveras les rues principales. Je suppose que tu pourras retrouver ton chemin à partir de là. »

Tu savais que d’ici quelques mètres, une première ruelle tournait à gauche. Ce n’était pas le chemin le plus court pour sortir d’ici… mais que le chemin soit long ou court, ça ne t’importait que peu. Il valait mieux réserver le chemin le plus court à l’enfant. Tant que la fillette suivait tes indications, elle arriverait à bon chemin… et tu n’allais pas la raccompagner jusqu’à l’orphelinat non plus, non, tu avais d’autres choses à faire. Enfin bon. Il était temps.

« Adieu. »

Tu accéléras brutalement. Plus besoin de modérer le train, tu n’avais plus à te laisser suivre. Tes pattes martelant le sol crasseux de ses ruelles sombres, tu bifurquas à gauche et disparut dans les ombres de ses murs étroits. Tu ralentis, tu t’arrêtes, et tu souffles un peu. Il fallait dire, tu n’étais pas très endurant non plus… mais en général, ta vitesse parvenait à combler ce point faible, et ce n’était pas une petite course qui aurait raison de toi, loin de là.
Tu souffles un grand coup, redresse la tête, et regarde autour de toi, pour t’assurer que tu étais bien seul. Tu commences à marcher vers la sortie, calmement, observant la ruelle.

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